Wheatfield : un champ de blé au milieu des grattes ciel

J'aimerai vous présenter Agnes Denes, une artiste plasticienne qui s'inscrit dans le courant land art  et dont j'apprécie le travail. Voici en quelques photos une de ses installations.

Au début des 80's et suite à la réalisation du World trade center, on déversa les déblais du chantier de construction des tours dans l'Hudson, pour combler et gagner du terrain afin de réaliser un nouveau projet de construction : La Battery park city avec le world financial center. Ce bout de terre artificielle devint le plus grand terrain vague de l'île de Manahattan .

C'est dans ce lieu que l'artiste réalisa son installation : un champ de blé de 8000m².

80 bennes de terre fertile furent déverser et on creusa à la main 285 sillons pour y semer des grains de blé, qui furent alors arrosés, cultivés puis recoltés. 

Cette création artistique jouait sur le paradoxe, évocant la richesse de la terre, faisant l'éloge de la vie à la campagne - " un petit paradis...une après midi d'été à la campagne, la paix " - et portant aussi en lui une dimension contestataire pour souligner l'aliénation des citadins à la production céréalière et montrer l'interet politique et surtout économique du commerce du blé. 

le champ de blé sur la Battery park city  

Pour l'artiste, le champ de blé de couleur or et formant une surface plane, s'opposait symboliquement et esthétiquement à l'élévation de la ville, aux immeubles gris et sales de Manahattan. Les tons verts et jaunes du champ de blé devaient contraster avec les tours jumelles du World trade center et Wall street, symbole majeur de la finance mondiale où l'on fixe le prix des denrées alimentaires.  

Wheatfield - a confrontation

Agnès Dénès s'explique sur son travail :

" ' Wheatfield ' était un symbole, un concept  universel. Il représentait la nourriture, l'énergie, la commerce, les échanges mondiaux, l'économie. "

" le fait de planter, de cultiver et de récolter ici 8000 m² de blé, de gaspiller des terrains de grance valeur et d'entraver les rouages en s'opposant au système était un affront. Tout cela en faisait le puissant paradoxe que j'avais recherché. "

Les reactions dans les journaux furent assez violentes, car le blé est un symbole puissant dans l'imagerie collective des Etats unis. On retrouve d'ailleurs dans l'histoire de la peinture américaine beaucoup de références à la culture du blé ou au champ de blé.

 " Fall plowing " de Grant Wood (artiste qui s'est illustré pour sa peinture du monde rural du middle west américain)

En ce début des années 80, le commerce du blé vivait une crise aussi importante que celle de 1929.  L'installation de Denes faisait alors référence  " à la mauvaise gestion des ressources et à la faim dans le monde. C'était une incursion dans la citadelle, une confrontation avec la culture d'élite " 

Oeuvre éphémère réalisée il y'a 30 ans dejà, cette installation  ne conserve t'elle pas grace aux photos toute son actualité pour notre monde d'aujourd'hui ?  Les buildings en fonds sur les photos, rappellent la puissance du capitalisme mondial, l'aliénation des peuples - qu'on écoute plus -  à un système de production et de répartition des richesses basés sur l'inéquité et  l'injustice absolue.

Obscénité de notre monde contemporain !